Jean-Frédéric Edelmann est né à Strasbourg le 5 mai 1749 dans une famille de facteurs d’orgues et de clavecins. Au lycée de Strasbourg, il fait la connaissance de Philippe-Frédéric, fils du baron de Dietrich (son cadet d’un an) avec lequel il poursuit ses études de droit à l’Université protestante.
En 1774, il s’installe à Paris où il se fait rapidement connaître, tant comme compositeur que claveciniste. Il enseigne également et a pour élèves, entre autres, Méhul et Louis Adam, le futur fondateur de l’école française de piano, Alsacien comme lui. En 1789, il retourne à Strasbourg et est nommé administrateur du Bas-Rhin. L’année suivante, son ami Philippe-Frédéric de Dietrich devient maire de Strasbourg. C’est à la demande de ce dernier qu’il compose, en 1790, un hymne pour la Fête de la Fédération. Edelmann et de Dietrich sont, tous deux, membres de la Société des Amis de la Constitution, mais, après l’arrestation de Louis XVI à Varennes, leurs opinions divergent : le premier est Jacobin (il présidera le club des Jacobins de Strasbourg), le second, monarchiste constitutionnel. De Dietrich sera arrêté en 1793, et bien qu’il s’était opposé à lui, Edelmann sera accusé de l’avoir soutenu. Il est arrêté à son tour avec son frère Geoffroy Louis. Ils seront jugés sommairement, puis guillotinés le 17 juillet 1794.
Edelmann fait partie des compositeurs auxquels a été attribuée la musique de la Marseillaise, en raison, notamment, de leurs liens d’amitiés (c'est De Dietrich qui aurait commandé une marche à Rouget de Lisle, auteur du texte mais certainement pas compositeur de la musique). Deux détails viennent contredire cette thèse : la divergence politique entre Edelmann et de Dietrich l’année précédant la composition de la Marseillaise et la fin tragique d’Edelmann. Pleyel, autre compositeur supposé de notre hymne national (qui avait, en outre, collaboré à plusieurs reprises avec Rouget de Lisle), considéré un temps comme royaliste et assigné à résidence, c’est vu, sans raison apparente, complètement réhabilité, obtenant même la nationalité française.
Commentaires
Dans un courrier du célèbre compositeur Grétry à Rouget de Lisle (qui venait de lui envoyer sa Marseillaise) on peut lire : " vous ne dites rien du musicien (le compositeur) est-ce Edelmann ? ".
Ma source est issue du livre de Maurice de la Fuye : Rouget de Lisle inconnu (1943) ; un écrivain reconnu, sérieux, très bien documenté.
Que Grétry pose cette question à Rouget de Lisle constitue une très grande présomption car Grétry connaissait bien De Lisle pour avoir collaboré avec lui . Ainsi il avait cerné les limites du talent de compositeur de ce personnage. Il connaissait aussi très bien la musique d'Edelmann, musicien très connu à son époque, reconnu par Mozart lui même comme compositeur de "jolies pièces". Il n'a pas choisi ce nom au hasard : il n'a pas désigné Pleyel dont il connaissait aussi la musique, comme le compositeur possible de la Marseillaise. Pleyel par ailleurs est parti pour Londres où il est arrivé le 23 décembre 1791 (engagé par le " professionnal concert ") ; puis il est revenu à Strasbourg en mai 1792. Pleyel absent, ne pouvait donc pas apporter de soutien méthodologique musical à De Lisle comme il est possible de le lire souvent. En 1781 Jean Frédéric Edelmann est joué à L'opéra de Paris avec son oratorio Esther dont un passage contiendrait la thématique musicale de "la Marseillaise ".
Sylvie Pécot-Douatte, licenciée de musicologie à l'université de Paris-Sorbonne et couronnée de nombreux prix a sorti les partitions d' Edelmann de l'oubli de la bibliothèque nationale. Elle a écrit un livre : " à la recherche d'Edelmann le musicien guillotiné ".
Toute cette histoire est passionnante et promet encore certains rebondissements dans l'avenir si une partition de l'oratorio Esther est retrouvée, seule oeuvre d'Edelmann aujourd'hui disparue mais dont Grisons maître de chapelle à Saint Omer aurait pu refaire une copie en n'indiquant pas le véritable auteur.
Bien cordialement,
Pierre Ménager