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  • Marie-Louise Beck, pionnière de l'hôtellerie de luxe

    Marie-Louise Beck.jpgMarie-Louise Beck est née le 29 octobre 1867 à Truchtersheim. D’une famille modeste (son père est marchand-boucher), elle a toutefois une tante, Alexandrine, qui a fait ce qu’on appelle un “beau mariage” : le mari de cette dernière, Xavier Jungbluth, originaire de Wolxheim, dirige le Grand Hôtel à Monaco.

    C’est lors d’un séjour chez sa tante que la petite Marie-Louise (elle n’a alors que 10 ans) croisera pour la première fois celui dont elle partagera la vie. César Ritz est beaucoup plus âgé qu’elle (il a 27 ans) et en tout début de carrière dans l’hôtellerie. Une dizaine d’année plus tard, Marie-Louise travaille dans un hôtel de Menton alors que César dirige le Grand Hôtel de la principauté. Ils se croisent à nouveau en de multiples occasions, se rapprochent et se marient le 16 janvier 1888 à Canne.

    Le couple quitte la Côte d’Azur pour s’établir à Baden-Baden où Ritz vient d’acquérir un établissement en association avec celui qui allait devenir le fondateur de la haute cuisine française, le chef Auguste Escoffier. Tous les trois quittent assez rapidement Baden-Baden pour Londres où Ritz vient de se voir confier la direction du tout nouveau Savoy. Pour la petite histoire, c’est là qu’Escoffier créera un dessert, devenu fameux, pour la cantatrice Nellie Melba. Le séjour londonien sera de courte durée : César Ritz ayant créer sa propre société hôtelière, il est licencié.

    Il choisit alors de s’installer à Paris et, le 1er juin 1898, ouvre son propre hôtel au 15 de la place Vendôme. Là, Escoffier et lui vont pouvoir exprimer pleinement leurs talents et développer leurs idées. Le premier met en place un système de fonctionnement toujours d’actualité : la brigade de cuisine avec ses postes bien définis, sa hiérarchie… Le second a pour ambition de faire de son hôtel le plus élégant et le plus moderne du monde. Ascenseur, électricité à tous les étages, téléphone dans toutes les chambres et, première mondiale, chaque chambre dispose d’une salle de bains et de toilettes.

    C’est là que nous retrouvons Marie-Louise. Elle assiste son mari pour tout ce qui concerne la décoration, le mobilier, le choix des couleurs. C’est elle, notamment, qui choisi la couleur des abat-jour pour mettre en valeur le teint des clientes ! C’est encore elle qui s’occupe de l’accueil des clients de prestige. Elle effectuera le même travail dans les autres hôtels que crée son mari. En 1907, César Ritz tombe malade. Marie-Louise prend de plus en plus de responsabilité et, lorsque César ne peut plus assumer sa charge et est démis de ses fonctions par le conseil d’administration, c’est elle qui en prend la direction et la conservera jusqu’en 1953. Elle créera encore la “Galerie des vitrines”, une galerie de boutiques de luxe au cœur du palace. Elle meurt en 1971. Son fils Charles, qui travaillait déjà à ses côtés, prend la direction du palace qu’il quittera en 1976, face à la réticence du conseil d’administration vis-à-vis de ses idées de modernisation. En 1979, l’hôtel est vendu au milliardaire égyptien Mohamed Al-Fayed.

  • Un chef d'oeuvre méconnu

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    C’est l’un des monuments les plus impressionnants de Strasbourg et peut-être l’un des plus méconnus du grand public. Il se trouve au fond de l’église Saint-Thomas, aux portes de la très fréquentée “Petite France“. Je veux parler du mausolée du maréchal de Saxe dû au célèbre sculpteur Pigalle.

    Maurice de Saxe est né le 28 octobre 1696 à Goslar (Basse-Saxe). Il est le fils adultérin de la comtesse Marie-Aurore de Königsmark et du prince-électeur de Saxe, Frédéric-Auguste Ier, futur roi de Pologne (sous le nom d’Auguste II, à partir de 1697). En 1721, il se met au service de la France et reçoit aussitôt un brevet de maréchal de camp. Il achète le régiment de Sparre-Infanterie qu’il rebaptise Saxe-Infanterie. En 1726, il se fait élire duc de Courlande et de Sémigalle entrant en conflit avec son père. Chassé par les troupes russes, il rentre en France l’année suivante. En 1734, il est promu lieutenant général, puis, le 26 mars 1744, Maréchal de France. Il participe à de nombreuses campagnes et se distingue particulièrement en remportant la victoire lors des batailles de Fontenoy et de Rocourt et en prenant Maastricht. En récompense de ses services, le roi le nomme gouverneur à vie de Chambord en 1748. C’est là qu’il décède le 30 novembre 1750.

    Amateur de théâtre… et de comédienne !

    Grand amateur de théâtre, Maurice de Saxe, avait créé une troupe de théâtre de campagne qui suivait ses troupes. Cette troupe fut un temps dirigé par Charles-Simon Favart, directeur du Théâtre de la Monnaie de Bruxelles et futur directeur de l’Opéra-Comique. Sa passion s’étendait également aux comédiennes : il fut l’amant d’Adrienne Lecouvreur et poursuivit de ses assiduités l’épouse de Favart, Justine, qu’il séquestra et à laquelle il écrivit, le 21 octobre 1749, une lettre qu’il terminait ainsi : «… vous n’avez point voulu faire mon bonheur et le vôtre : peut-être ferez-vous mon malheur et celui de Favart ; je ne le souhaite point, mais je le crains. Adieu». Sous le coup d’une lettre cachet, Favart se réfugia dans les environs de Strasbourg. Dans ces mémoires, l’abbé de Voisenon évoque «le malheureux Favart, caché chez un curé de campagne, dans une cave à la lueur d’une lampe, y vivait du talent qu’il avait à peindre les éventails»

    Le mausolée

    A la mort de Maurice de Saxe, Louis XV souhaite l’inhumer à Saint-Denis mais doit y renoncer : bâtard, étranger et protestant, de Saxe n’y a pas sa place. En 1751, le corps est transféré à l’église Saint-Thomas, la “cathédrale du protestantisme“ de Strasbourg et le roi passe commande à Jean-Baptiste Pigalle d’un mausolée qui sera achevé en 1776.

  • Les possédés d'Illfurth

    Illfurth.jpgLe 27 octobre 1869, l’un des plus célèbres cas de possession connus en Alsace trouvait un terme. Un cas relaté par le père Paul Sutter, curé de Wickerschwihr, dans “Le Diable ses Paroles, son Action dans les Possédés d'Illfurt (Alsace) d'après des documents historiques” en 1921, un livre qui s’appuie sur les nombreux écrits de témoins directs.

    Tout avait commencé cinq ans plus tôt, en automne 1864, à Illfurth. Là, vivait la famille Burner. Le père, Joseph, était marchand ambulant et la mère, Marie-Anne, née Foltzer, s’occupait des cinq enfants du couple. Ce sont les deux enfants les plus âgés, Thiébaut (né le 21 août 1855) et Joseph (29 avril 1857) qui vont être au cœur de cette surprenante et mystérieuse histoire. Les deux garçons sont d’un naturel plutôt calme et suivent une scolarité assez moyenne quand, à l’automne 1869, tous les deux sont atteints d’une maladie que le Dr Lévy, d’Altkirch, ne parvient pas à identifier. D’autres médecins, appelés à examiner les enfants, ne pourront pas établir de diagnostic. Aucun des médicaments ou remèdes prescrits n’apportera la moindre amélioration et les deux garçons maigrissent et s’affaiblissent de jour en jour. Cela dure ainsi pendant près d’une année, jusqu’à ce que de nouveaux troubles apparaissent : les deux garçons tournent sur eux-mêmes lorsqu’ils sont couchés, pris de crises de violence ils frappent les meubles, ils restent inanimés pendant de longs moments après d’impressionnantes convulsions… Plus étrange encore, des témoins, parmi lesquels le brigadier de gendarmerie Werner, affirment voir le ventre des enfants gonfler soudainement. Ce même brigadier, qui relate ce phénomène dans un rapport, donne un autre exemple : « Tout à coup nous entendîmes une clameur surgir de la chambre. Nous y étant précipités nous vîmes Thiébaut soulevé par une force mystérieuse et planant au-dessus de son siège à 30 ou 40 centimètres environ. Il resta plusieurs minutes dans cette attitude. Toute l'assistance était très impressionnée. Une jeune demoiselle saisit le bénitier et fit des aspersions. Après avoir hésité, et par saccades, l'enfant retomba sur son siège; il paraissait épuisé et demanda à se recoucher ».

    Et, lorsque les enfants, se plaignant de démangeaisons, se déshabillent, des plumes et une sorte d’algue tombent de leurs vêtements ! L’odeur de ces “déchets maléfiques” est tellement insoutenable que leurs proches les brûlent immédiatement… sans qu’il en reste la moindre cendre !

    C’est à cette période que Thiébaut affirme recevoir régulièrement la visite d’une étrange créature, que lui seul peut voir, qu’il décrit comme « une grosse oie, mais avec un bec très long et de grands yeux verts comme du phosphore ». Cette créature tenterait de l’étrangler et, là encore, des témoins assistent à son combat avec cette créature qu’ils ne peuvent voir. En dehors de leurs crises, les enfants avaient un comportement parfaitement normal et n’en gardaient aucun souvenir.

    L’un des médecins consultés, le Dr Alfred Szerlezkin, fut l’un des premiers a évoquer une cause surnaturelle à ces phénomènes et en parla au père Charles Brey, curé du village. La réaction violente des enfants, face aux objets religieux qui leur étaient présentés, ne pouvait que confirmer l’hypothèse envisagée par le curé : les garçons étaient sous l’emprise de démons ! Et la suite des évènement allait encore renforcer cette certitude. Le père Sutter en donne un exemple : « Ils parlaient les langues les plus diverses, répondaient couramment en français, en latin, en anglais et comprenaient même les patois de France et d’Espagne ».

    Le cas commençant à être connu, plusieurs personnes s’étaient déplacées pour venir l’étudier : Ignace Spies, maire de Sélestat, un dénommé Martinot, directeur de la régie de Sélestat, et le professeur Lachemann de la Congrégation des Frères de Marie de Saint-Hippolyte.

    Le Père Souquat, exorciste dépêche sur place, interroge les enfants et obtient le nom des démons qui possèdent les deux frères : Thiébaut est sous l’emprise d’Orobas et Ypès, Joseph de Zolalethiel et d’un autre démon qui ne peut être identifié. En février 1868, Thiébaut est frappé de surdité par Ypès, ne retrouvant l’ouïe que lors de crises de possession.

    Les enfants semblaient également développer des dons de voyance, annonçant à plusieurs reprises des décès. Là encore, le père Sutter rapporte un cas précis. A la demande du sous-préfet d’Altkirch, Dubois de Jancigny, la municipalité avait accueilli les enfants dans une salle de la maison commune et, plus sa part, l’évêque de Strasbourg, Mgr André Raëss, avait envoyé deux religieuses du couvent de Niederbronn pour s’occuper des enfants. « A leur arrivée elles furent reçues à la gare par le Maire et quelques notables de la localité qui les conduisirent auprès des enfants. Ceux-ci, quoique ne les ayant jamais vues ni connues les appelèrent chacune par leur nom en les tutoyant. Ils dirent à la sœur Severa, qui était née en Bavière, le nombre et les occupations de ses frères et sœurs et lui découvrirent les plus intimes secrets ».

    13 avril 1869, Mgr Raëss nomme une commission d’enquête, composée de trois ecclésiastiques : le chanoine Stumpf, supérieur du Grand Séminaire, le père Sester, curé de Mulhouse, et le père Freyburger, curé d’Ensisheim. Leur premier contact avec les enfants sera déterminant : le chanoine Strumpf propose de placer les enfants dans un établissement religieux pour pouvoir procéder à un exorcisme. Le premier, Thiébaut est conduit à l’orphelinat Saint-Charles de Schiltigheim en septembre 1869. Le dimanche 3 octobre, Thiébaut est porté de force dans chapelle de l’orphelinat. Il ne faudra pas moins de trois personnes pour l’y amener ! En présence de la mère de l’enfant, de cinq ecclésiastiques et de six religieuses, le Père Souquât commence la cérémonie d’exorcisme. Il s’arrêtera, épuisé, au bout de trois heures. Le lendemain, à quatorze heures, l’exorcisme reprend. Cette fois, sanglé dans un corset de fer, l’enfant est attaché sur une chaise. Au bout de deux heures, enfin : « Le possédé se retourna et se tordit comme un serpent piétiné. Soudain un léger craquement se fait entendre dans le corps; l'enfant s'allonge, se détend et tombe comme raide mort. Le démon était parti ! … maintenant l'enfant reste là, étendu pendant une heure au moins, comme assoupi dans un profond sommeil. Il est délivré, ne réagit plus contre le crucifix et l'eau bénite et se laisse porter dans sa chambre sans opposer la moindre résistance ». L’enfant peut retourner à Illfurth et reprendre le cours d’une vie normale : « Il était redevenu le gentil garçon d'autrefois, mais ne savait rien des quatre dernières années; il lui semblait avoir dormi tout ce temps ». Restait Joseph.

    L’abbé Brey obtient enfin l’autorisation d’exorciser Joseph et la cérémonie pourra avoir lieu le 27 octobre. Elle se déroule dans la chapelle du Burnenkirch, en présence des parents, des trois enquêteurs officiels (le professeur Lachemann, Ignace Spies et Martinot), ainsi que du maire, de l’instituteur, du chef de gare et de la directrice de l’école des filles. Là encore, l’exorcisme dure plus de trois heures, et puis : « l'enfant s'allonge, se tourne et se retourne, gonfle les joues et fait une dernière convulsion. Puis il devient silencieux, immobile. On détache les courroies : les bras s'affaissent, la tête retombe en arrière. Un instant après il élève les bras, s'étire comme quelqu'un qui sort du sommeil, ouvre les yeux restés fermés pendant toute la cérémonie, et paraît tout étonné de se trouver dans, une église, au milieu d’étrangers ».

    Les deux garçons ne gardèrent aucun souvenir de ces quatre années de souffrance et menèrent une vie normale. Thiébaut mourut deux ans plus tard, le 2 avril 1871, et Joseph le 13 janvier 1884. A l’initiative du curé Brey une statue de la Vierge, en fonte dorée, fut édifiée devant l’ancienne maison de Burner.