Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

D'r Elsass blog fum Ernest-Emile - Page 39

  • Les possédés d'Illfurth

    Illfurth.jpgLe 27 octobre 1869, l’un des plus célèbres cas de possession connus en Alsace trouvait un terme. Un cas relaté par le père Paul Sutter, curé de Wickerschwihr, dans “Le Diable ses Paroles, son Action dans les Possédés d'Illfurt (Alsace) d'après des documents historiques” en 1921, un livre qui s’appuie sur les nombreux écrits de témoins directs.

    Tout avait commencé cinq ans plus tôt, en automne 1864, à Illfurth. Là, vivait la famille Burner. Le père, Joseph, était marchand ambulant et la mère, Marie-Anne, née Foltzer, s’occupait des cinq enfants du couple. Ce sont les deux enfants les plus âgés, Thiébaut (né le 21 août 1855) et Joseph (29 avril 1857) qui vont être au cœur de cette surprenante et mystérieuse histoire. Les deux garçons sont d’un naturel plutôt calme et suivent une scolarité assez moyenne quand, à l’automne 1869, tous les deux sont atteints d’une maladie que le Dr Lévy, d’Altkirch, ne parvient pas à identifier. D’autres médecins, appelés à examiner les enfants, ne pourront pas établir de diagnostic. Aucun des médicaments ou remèdes prescrits n’apportera la moindre amélioration et les deux garçons maigrissent et s’affaiblissent de jour en jour. Cela dure ainsi pendant près d’une année, jusqu’à ce que de nouveaux troubles apparaissent : les deux garçons tournent sur eux-mêmes lorsqu’ils sont couchés, pris de crises de violence ils frappent les meubles, ils restent inanimés pendant de longs moments après d’impressionnantes convulsions… Plus étrange encore, des témoins, parmi lesquels le brigadier de gendarmerie Werner, affirment voir le ventre des enfants gonfler soudainement. Ce même brigadier, qui relate ce phénomène dans un rapport, donne un autre exemple : « Tout à coup nous entendîmes une clameur surgir de la chambre. Nous y étant précipités nous vîmes Thiébaut soulevé par une force mystérieuse et planant au-dessus de son siège à 30 ou 40 centimètres environ. Il resta plusieurs minutes dans cette attitude. Toute l'assistance était très impressionnée. Une jeune demoiselle saisit le bénitier et fit des aspersions. Après avoir hésité, et par saccades, l'enfant retomba sur son siège; il paraissait épuisé et demanda à se recoucher ».

    Et, lorsque les enfants, se plaignant de démangeaisons, se déshabillent, des plumes et une sorte d’algue tombent de leurs vêtements ! L’odeur de ces “déchets maléfiques” est tellement insoutenable que leurs proches les brûlent immédiatement… sans qu’il en reste la moindre cendre !

    C’est à cette période que Thiébaut affirme recevoir régulièrement la visite d’une étrange créature, que lui seul peut voir, qu’il décrit comme « une grosse oie, mais avec un bec très long et de grands yeux verts comme du phosphore ». Cette créature tenterait de l’étrangler et, là encore, des témoins assistent à son combat avec cette créature qu’ils ne peuvent voir. En dehors de leurs crises, les enfants avaient un comportement parfaitement normal et n’en gardaient aucun souvenir.

    L’un des médecins consultés, le Dr Alfred Szerlezkin, fut l’un des premiers a évoquer une cause surnaturelle à ces phénomènes et en parla au père Charles Brey, curé du village. La réaction violente des enfants, face aux objets religieux qui leur étaient présentés, ne pouvait que confirmer l’hypothèse envisagée par le curé : les garçons étaient sous l’emprise de démons ! Et la suite des évènement allait encore renforcer cette certitude. Le père Sutter en donne un exemple : « Ils parlaient les langues les plus diverses, répondaient couramment en français, en latin, en anglais et comprenaient même les patois de France et d’Espagne ».

    Le cas commençant à être connu, plusieurs personnes s’étaient déplacées pour venir l’étudier : Ignace Spies, maire de Sélestat, un dénommé Martinot, directeur de la régie de Sélestat, et le professeur Lachemann de la Congrégation des Frères de Marie de Saint-Hippolyte.

    Le Père Souquat, exorciste dépêche sur place, interroge les enfants et obtient le nom des démons qui possèdent les deux frères : Thiébaut est sous l’emprise d’Orobas et Ypès, Joseph de Zolalethiel et d’un autre démon qui ne peut être identifié. En février 1868, Thiébaut est frappé de surdité par Ypès, ne retrouvant l’ouïe que lors de crises de possession.

    Les enfants semblaient également développer des dons de voyance, annonçant à plusieurs reprises des décès. Là encore, le père Sutter rapporte un cas précis. A la demande du sous-préfet d’Altkirch, Dubois de Jancigny, la municipalité avait accueilli les enfants dans une salle de la maison commune et, plus sa part, l’évêque de Strasbourg, Mgr André Raëss, avait envoyé deux religieuses du couvent de Niederbronn pour s’occuper des enfants. « A leur arrivée elles furent reçues à la gare par le Maire et quelques notables de la localité qui les conduisirent auprès des enfants. Ceux-ci, quoique ne les ayant jamais vues ni connues les appelèrent chacune par leur nom en les tutoyant. Ils dirent à la sœur Severa, qui était née en Bavière, le nombre et les occupations de ses frères et sœurs et lui découvrirent les plus intimes secrets ».

    13 avril 1869, Mgr Raëss nomme une commission d’enquête, composée de trois ecclésiastiques : le chanoine Stumpf, supérieur du Grand Séminaire, le père Sester, curé de Mulhouse, et le père Freyburger, curé d’Ensisheim. Leur premier contact avec les enfants sera déterminant : le chanoine Strumpf propose de placer les enfants dans un établissement religieux pour pouvoir procéder à un exorcisme. Le premier, Thiébaut est conduit à l’orphelinat Saint-Charles de Schiltigheim en septembre 1869. Le dimanche 3 octobre, Thiébaut est porté de force dans chapelle de l’orphelinat. Il ne faudra pas moins de trois personnes pour l’y amener ! En présence de la mère de l’enfant, de cinq ecclésiastiques et de six religieuses, le Père Souquât commence la cérémonie d’exorcisme. Il s’arrêtera, épuisé, au bout de trois heures. Le lendemain, à quatorze heures, l’exorcisme reprend. Cette fois, sanglé dans un corset de fer, l’enfant est attaché sur une chaise. Au bout de deux heures, enfin : « Le possédé se retourna et se tordit comme un serpent piétiné. Soudain un léger craquement se fait entendre dans le corps; l'enfant s'allonge, se détend et tombe comme raide mort. Le démon était parti ! … maintenant l'enfant reste là, étendu pendant une heure au moins, comme assoupi dans un profond sommeil. Il est délivré, ne réagit plus contre le crucifix et l'eau bénite et se laisse porter dans sa chambre sans opposer la moindre résistance ». L’enfant peut retourner à Illfurth et reprendre le cours d’une vie normale : « Il était redevenu le gentil garçon d'autrefois, mais ne savait rien des quatre dernières années; il lui semblait avoir dormi tout ce temps ». Restait Joseph.

    L’abbé Brey obtient enfin l’autorisation d’exorciser Joseph et la cérémonie pourra avoir lieu le 27 octobre. Elle se déroule dans la chapelle du Burnenkirch, en présence des parents, des trois enquêteurs officiels (le professeur Lachemann, Ignace Spies et Martinot), ainsi que du maire, de l’instituteur, du chef de gare et de la directrice de l’école des filles. Là encore, l’exorcisme dure plus de trois heures, et puis : « l'enfant s'allonge, se tourne et se retourne, gonfle les joues et fait une dernière convulsion. Puis il devient silencieux, immobile. On détache les courroies : les bras s'affaissent, la tête retombe en arrière. Un instant après il élève les bras, s'étire comme quelqu'un qui sort du sommeil, ouvre les yeux restés fermés pendant toute la cérémonie, et paraît tout étonné de se trouver dans, une église, au milieu d’étrangers ».

    Les deux garçons ne gardèrent aucun souvenir de ces quatre années de souffrance et menèrent une vie normale. Thiébaut mourut deux ans plus tard, le 2 avril 1871, et Joseph le 13 janvier 1884. A l’initiative du curé Brey une statue de la Vierge, en fonte dorée, fut édifiée devant l’ancienne maison de Burner.

  • Le premier duc d'empire était Alsacien

    Lefebvre.jpgFrançois-Joseph Lefèbvre est né le 25 octobre 1755 à Rouffach.

    Les différentes biographies divergent sur le métier de son père : ancien hussard, garde-champêtre, gardien des portes de la ville, meunier, aubergiste… Elles ne s’accordent que sur un point : il décède alors que François-Joseph n’a que huit ans. Sa mère se remarie et le garçon est alors élevé par son oncle, l’abbé Jean-Christophe Lefèbvre, curé de Guémar, qui le prépare à entrer au séminaire. Mais le 10 septembre 1773, Lefèbvre s’engage dans les Gardes-Françaises. Le 28 juin 1782, il est promu sergent. Le 1er mars 1783, il épouse à Montmartre une jeune blanchisseuse, installée à Paris et originaire de la vallée de Saint-Amarin, Catherine Hubscher, celle-là même qui inspirera à Victorien Sardou le personnage de Madame Sans-Gêne.

    Le 9 avril 1788, Lefèbvre est promu premier sergent, puis, le 1er septembre 1789, lieutenant instructeur dans la Garde Nationale. Le 1er janvier 1792, il est affecté au 13e bataillon d’infanterie légère avec le grade de capitaine. Le 3 septembre 1793, il est promu adjudant général, chef de bataillon (colonel), puis, le 2 décembre suivant, général de brigade à l’Armée de la Moselle sous le commandement de Hoche. Un mois plus tard, le 10 janvier 1794, il devient général de division. Il est alors de toutes les grandes batailles dans le nord et l’est et est le premier des généraux français à franchir le Rhin à la tête de ses troupes. Le 13 mars 1798, il est nommé gouverneur de la forteresse de Mayence.

    Grièvement blessé à Pfullendorf, le 21 mars 1799, il est contraint de quitter le front. Il revient à Paris dont il est nommé gouverneur militaire. Ce poste lui permet de jouer un rôle essentiel lors du coup d’état du 18 brumaire, ce qui lui vaudra d’être nommé sénateur le 1er avril 1800. Le 19 mai 1804, il est élevé au rang de Maréchal de l’Empire mais ne retrouve un commandement que l’année suivante. C’est à la tête du 10ème corps de la Grande Armée qu’il va une nouvelle fois se distinguer en prenant Dantzig ce qui lui vaudra d’être le premier duc d’Empire créé par Napoléon.
    Le nouveau duc de Dantzig participera encore aux campagnes d’Espagne, de Bavière et de Russie.

    Après l’abdication de Napoléon, il vote la déchéance de l’empereur au Sénat et est fait pair de France par Louis XVIII, le 4 juin 1814. Il se rallie à Napoléon lors des Cent-Jours ce qui lui vaudra d’être déchu de son titre de Pair de France qu’il recupère le 5 mars 1819. Retiré de la vie militaire, il se consacre alors à la ville de Pontault-Combault dont il était maire depuis 1813 et où il possédait un château.

    Il décède dans son hôtel parisien le 14 septembre 1820.

    Il est inhumé au cimetière du Père Lachaise. Son nom est inscrit sur l’arc de triomphe et il a sa statue sur la façade nord du Louvre, rue de Rivoli.

  • Jean-Pierre Clause, l'inventeur du foie gras de Strasbourg

    terrine2.jpgEn le classant parmi les Alsaciens célèbres, j'avoue "pousser un peu le bouchon" : Jean-Pierre Clause était Mosellan. Mais après tout, les liens entre Alsaciens et Mosellans sont étroits, nous pouvons donc "l'assimiler" et c'est à Strasbourg qu'il a créé son fameux pâté !

    Jean-Pierre Clause est né le 24 octobre 1757 à Dieuze en Moselle où son père Sébastien, est tonnelier. Il débute très jeune son apprentissage en cuisine, d’abord à Evreux (ce qui explique que, dans certains textes, il est considéré comme Normand), puis à Paris, avec son oncle, au service du comte d’Artois. A 21 ans, il rejoint son frère aîné, pâtissier, à Strasbourg et entre au service du marquis de Contades, maréchal de France et gouverneur militaire d’Alsace.

    C’est là, entre 1779 et 1783, qu’il créa le pâté de foie gras qui allait le rendre célèbre : une croûte de pâte garnie de foies gras entiers, d’une farce de veau et de lard finement hachés. Le succès fut tel que le maréchal fit porter un pâté au roi, à Versailles !

    Dans sa “Physiologie du goût“, Brillat-Savarin décrit l’effet produit par ce pâté sur les convives de ce qu’il appelle “un dîner de gourmands de qualité“ : «…toutes les conversations cessèrent par la plénitude des coeurs… et quand les assiettes de distribution eurent passé, je vis se succéder, tour à tour, sur les physionomies, le feu du désir, l’extase de la jouissance, le repos parfait de la béatitude.»

    Le 10 février 1784, Clause épouse Marie-Anne Maring, veuve d’un pâtissier qui avait une boutique au 3 rue du Marché-aux-Chevaux (qui allait peu après devenir le 18 rue de la Mésange, ce qui correspond au 15 de la même rue de nos jours !). Le 28 février 1784, après avoir obtenu son brevet de maîtrise, il s’inscrit à la “Tribu des pâtissiers“ et reprend la boutique où il vend, entre autres, son fameux pâté.

    En 1790, Nicolas-Francois Doyen, cuisinier du président du Parlement de Bordeaux vient travailler avec Clause. C’est lui qui aura l’idée d’ajouter, au fameux pâté, un produit de son terroir : la truffe. Et, lorsque deux ans plus tard, il s'installe à son compte, il commercialise le “pâté de foie gras de Strasbourg aux truffes du Périgord“.

    Clause décède le 21 novembre 1827. Sa boutique est reprise par un dénommé Fritsch qui la cédera, vers 1846, à un neveu de Clause, J. Jehl, qui la transfère 3 rue du Dôme.