En Alsace, qui dit Pâques, pense lièvre : encore une tradition qui est née dans notre région ! Je vais finir par croire que l’Alsace est le centre du monde…
L’œuf est sans doute le plus vieux et le plus universel symbole de vie et de renaissance et, depuis la nuit des temps, de multiples rituels lui ont été associés. De là à établir un lien avec à Pâques qui, dans la tradition chrétienne, est le moment de la renaissance, d’un nouveau départ, il n’y avait qu’un pas. D’autant plus que la consommation d’œufs étant interdite lors du Carême, les distribuer ou les offrir était la meilleure solution pour écouler les importantes quantités récoltées durant ces 40 jours. C’est au XIIIème siècle que cette coutume s’est installée : les œufs étaient bénis puis offerts tels quel. La noblesse allait s’emparer de cette tradition en la faisant évoluer : les œufs étaient décorés, peints ou garnis de joyaux. Au XVIème siècle apparurent les premiers œufs contenant une surprise.
Et ce n’est qu’au XVIIIème siècle que l’on eut l’idée de vider un œuf pour le remplir de chocolat.
Mais dans les pays germaniques existe une autre tradition : c’est le lièvre de Pâques qui apporte les œufs. Comme beaucoup d’autres, cette tradition est née en Alsace, il y a plus de 300 ans. Il en est fait mention pour la première fois dans un texte de 1678 (ou 1682, selon les sources) “De ovis paschalibus“ de Georg Franck von Frankenau qui en situe clairement l’origine en Alsace.
Si l’origine géographique ne fait aucun doute, les origines historiques de cette tradition restent vagues. On peut toutefois relever que le lièvre était l’animal d’Aphrodite et de la déesse germanique de la Terre, Holda, et qu’il était également l’animal symbolique du Christ dans l’empire byzantin.
La légende veut qu’une vieille femme, qui n’avait pas assez d’argent pour acheter des œufs décorés pour ses petits-enfants, décida d’en peindre elle-même. Elle les cacha dans son jardin sous de petits tas de brindilles et appela ensuite les enfants pour les inviter à chercher leurs surprises. Tout à coup, un lièvre surgit de l’un des ces petits nids. Les enfants étaient alors persuadés que c’était ce lièvre qui avait déposé les œufs.
Voilà comment est née la tradition du lièvre de Pâques. Lièvre et non lapin !
Comme pour celle de Noël, cette tradition a été apportée aux Etats-Unis par la vague migrante d’origine germanique et c’est ainsi que les petits Américains espèrent que “l’Easter Bunny” leur apportera des lapins en chocolat et des sucreries dans un panier tressé... Le lièvre était devenu lapin et c'est sous cette forme qu'il s'est fait connaître en France au cours des dernières années (l'influence des séries américaines !) alors qu'il y était totalement inconnu (hors de sa région d'origine, bien évidemment). Je me rappelle encore la surprise d'amis, il y a une trentaine d'années, venant pour la première fois en Alsace à l'approche de Pâques et découvrant nos lièvres en chocolat !
Les cloches en chocolat se rattachent à une autre tradition.
En signe de deuil, l’Eglise avait interdit de faire sonner les cloches à partir du Jeudi Saint. Durant cette période, ce sont les enfants qui appelaient aux offices en parcourant les rues des villages en agitant des crécelles. Les cloches ne sonnaient à nouveau que le jour de Pâques. D’où cette légende des cloches qui partiraient pour Rome durant ces quelques jours. A défaut de les entendre sonner, on les mangeait !
Dans la tradition protestante, le Vendredi Saint reste un jour particulier, férié dans les deux départements alsaciens et en Moselle (dans lesquels le concordat a été maintenu). A Strasbourg, en l’église Saint-Guillaume, tous les Vendredis Saints est donnée l’une des Passions de Bach, une tradition qui a été établie par Ernest Munch et Albert Schweitzer.